Samedi 27 Octobre
Une vraie soirée Halloween a l’américaine où Sorcières, Vampires et Dieux
Grecs se sont côtoyés dans la joie et la bonne humeur.
On apprend à connaitre les gens et au fil des conversations, le sujet de la
tempête qui se prépare est sur toutes les bouches. Certains disent que ca va être
la plus grosse tempête jamais vue depuis le XIXème siècle. D’autres
disent que ce n’est rien et que tout le monde en fait un peu trop.
Dimanche 28 Octobre
Je descends au Bread & Butter pour déjeuner. Tous les rayons sont dévalisés
: les packs d’eau partent les uns après les autres, les caddies sont remplis de
provisions et les stands de bagels, salades, pizzas et autres sont pris d’assaut.
A ce moment là, le stress grandit en moi : et si je faisais pareil ? Sans réellement
savoir ce que je fais, je me mets à faire des provisions. Mais qu’est-ce qu’il
faut acheter en cas de tempête ? Et si je n’ai plus d’électricité ? Et si je
n’ai plus d’eau ? Résultat : eau, chips, M&M’s, glace Ben&Jerry, pain,
fromage et jambon de dinde. Puis je cours à la recherche de lampes torches :
stock épuisé partout. Bougies : idem. Je rentre bredouille et pas nécessairement
serein. Je reçois un sms de ma collègue me prévenant que demain nous fermerons
la boutique, comme tout le reste de Manhattan en fait. Les nuages gris
commencent alors à faire leur apparition.
"Je vais devenir tellement gros que le vent ne pourra pas m'emporter"
Lundi 29 Octobre
Journée grise et triste. Un peu de vent, un peu de pluie mais rien
d’alarmant. L’Etat de New York nous a conseillé de rester
enfermés chez nous. Tous les bureaux sont donc fermés, seules quelques
épiceries prennent le risque de rester ouvertes. Je passe donc ma journée à
regarder des séries sur mon ordinateur. Et pour avoir meilleure conscience, je
me mets à vérifier mes mails professionnels et que lis-je ? Un client,
Andrew S., se plaint car notre compagnie de livraison ne peut pas livrer
son sofa à cause de la tempête. Du coup, il veut un remboursement total. No
comment.
20h30 : coupure de courant. Mes colocataires et moi-même, nous nous
dirigeons vers le hall d’entrée car la lumière de sécurité est restée allumée. Nos
voisins ont eu la même idée. Nous nous mettons donc à nous asseoir et à parler.
Certains se mettent à fumer, un autre se met à jouer de la guitare et moi je
ramène le reste de junk food. A l’extérieur, c’est le noir total. Les sirènes
commencent à retentir au loin. Le vent souffle de plus en plus fort. Et pour clôturer
ce spectacle, les lumières de sécurité se sont mises à lâcher.
01h30 : nous nous mettons tous au lit.
Je vous laisse deviner où je vis...
Photo by Nick Summers: http://instagram.com/p/ RYue5_koDz/
Mardi 30 Octobre
Lendemain de tempête, constatation des dégâts.
Toujours pas d’électricité. On apprend que seule la partie Sud de Manhattan
a été touchée : une centrale électrique a explosé. Le showroom n’a rien
mais n’a pas non plus d’électricité. Je ne travaille donc pas.
Je ne sais pas trop quoi faire. Je regarde mon portable, bientôt plus de
batterie. Je sors et me dirige vers un supermarché. Objectif, charger mon
portable. Une queue interminable. Je rentre chez moi et reviens avec une
rallonge. Non seulement, ça me permet de passer devant tout le monde mais en
plus j’en fais profiter aux autres. Merci Samsung pour faire des batteries de
merde : deux heures d’attente pour charger. Durant cette attente, je
commence à parler aux gens autour. Une dame me dit que c’est durant les
périodes difficiles que l’on découvre le meilleur des New-Yorkais. Et au moment
où je me dis que la solidarité à New York existe, ma collègue m’appelle pour me
dire qu’elle a transféré la ligne du showroom sur son portable et qu’Andrew S. est
très mécontent car nous ne lui donnons aucune nouvelle. Je ne m’abandonne pas à
sa cause, j’ai d’autres chats à fouetter ! Batterie 90% remplie, ça
suffira. Je me dirige vers le showroom pour voir les dégâts : ma collègue
est coincée à Philadelphie et ma boss est coincée dans le Nord de Manhattan
(pas de métro). La rue est déserte et il n’y a personne. Heureusement, pas de
dégât. En voyant mon ordinateur portable professionnel, je me dis que je peux toujours
revenir demain pour charger mon téléphone à partir de la batterie de cet
ordinateur.
Rendez-vous de tous les gens du sud autour des prises électriques
18h, le soleil se couche. Il fait un noir total chez moi. Je n’ai rien à
faire. Du coup, je m’endors à 19h… pour bien sûr me réveiller à 23h. Je suis
nerveusement fatigué, j’ai envie de sortir, et j’ai faim. Je me dirige vers le
nord. Je marche une demi-heure et me pose dans un fast-food pour manger et pour
charger ma batterie jusqu’à 75%. Je rentre chez moi vers 2h. Plus je descends,
plus la pénombre m’engloutit.
J'habite au bout de la rue
Mercredi 31 Octobre
Je parviens, malgré les sirènes, à me réveiller qu’à 10h30. Midi, direction
le store pour charger mon portable. Je le pose et pars me balader dans une des
parties sinistrées de Manhattan, dans l’East Village : des arbres
arrachés, des magasins sombres, des gens qui marchent à contre-courant et qui
se dirige vers le nord avec un sac à dos. Si j’ai toujours de
l’eau chaude, beaucoup n’ont pas eu cette chance. D’autres n’ont même pas eu d’eau
tout court. Je reviens au showroom et me dirige vers un supermarché pour m’acheter
à manger : chips et cookies. Je trouve des lumières d’Halloween, j’en
prends deux sans même réfléchir. Je rentre chez moi et commence à faire mes
valises. N’oublions pas que Samedi, je dois juste déménager ma vie à Chicago.
Le soir, je retourne chez mon fast-food pour recharger ma batterie et je rejoins
Marie K. dans un bar. Marie K. vit à Soho : pas d’électricité, pas d’eau
chaude. Boire pour oublier. Dans le bar, les écrans montrent les informations. On
est subjugués par les images que nous voyons. Des maisons détruites dans le New
Jersey, le métro inondé dans le Financial District, une grue qui menace de s’écraser.
Nous nous remettons à rentrer chez nous. Ah oui, Happy Halloween.
Boire pour oublier
Jeudi 1 Novembre
La routine s’installe. Je me réveille, je me dirige vers le showroom pour
charger mon portable. Marie K. me rejoint pour qu’on retourne chez moi afin qu’elle
puisse prendre une douche chaude. Puis c’est parti pour un Power Hunting. Nous
cherchons un Starbucks, un coffee shop mais tous sont fermés ou blindés. On arrive sur la 81ème rue, dans un
Starbucks. Je vérifie mes mails professionnels sur mon portable, histoire d’avoir
une idée de ce qui m’attend. Andrew S. m’a harcelé. Selon lui, les New Yorkais
sont des gens forts qui ne se laissent pas abattre et qu’ils continuent de
vivre quoiqu’il arrive. Il poursuit son plaidoyer en finissant par dire que ce
n’est pas professionnel de ne pas lui donner de réponse. Fuck him ! Nous
marchons pendant deux heures, le métro reprend petit à petit dans le nord. 16h,
je reviens chez moi pour finir mes valises. Je décide ensuite de sortir pour
rejoindre d’autres amis. Impossible de rester enfermé chez moi dans le noir.
A défaut de bougies...
Vendredi 2 Novembre
Les choses commencent à reprendre leur cours. Certains peuvent retourner
travailler. L’électricité est revenue dans le Financial District. Toujours rien
chez moi. Je rejoins ma collègue et ma boss pour un dernier déjeuner. J’en
profite pour charger ma batterie (lourd hein ?). Si je n’avais pas fait
mes valises, j’aurais très vite oublié que je devais partir pour Chicago le
lendemain. Très bon moment, un peu triste. Sam L. a gentiment proposé de venir
de Poughkeepsie m’emmener à l’aéroport samedi. Oui, car pendant toute cette
semaine, il était quasi-impossible de rentrer dans Manhattan, et les taxis ne
veulent pas t’emmener en dehors de la ville à cause d’une pénurie d’essence. Les
avions ont été annulés et beaucoup ont dû décaler leurs vols. Sam L. parvient à
rentrer dans Manhattan via un pont moins encombré. Nous partons rejoindre Marie
K., Julie J., Valentine P. et Eleonore D. pour un dernier restaurant
New-Yorkais. On continue les au-revoirs. Ca devient de plus en plus difficile. On
rentre chez moi, l’électricité est revenue !
Samedi 3 Novembre
Levé à 10h. Je finis de faire mes valises très difficilement. Je donne les
clés de mon appartement à Mélanie, une Française qui reprend ma chambre. 12h,
je m’achète un bagel et direction l’aéroport. Mon avion est à 17h. Je ne veux
pas prendre le risque de rater mon vol… Mais en fait, il n’y a personne sur les
routes, 12h30, j’arrive à l’aéroport.
Le billet aller coûte $95. Deux valises en surpoids coûtent $200. Mais
apparemment mes valises sont encore plus lourdes que ce que je croyais. Donc
soit, je paye $300, soit j’enlève 5 kilogrammes. J’enlève ces 5 kilogrammes mais j’apprends
qu’il est plus intéressant de garder ces poids et de reclasser mon billet pour
$90.
Je me retrouve donc en Première Classe. Tiens, ça me dit quelque chose !
Je dis au revoir à Sam, mon dernier au revoir à New York. C’est difficile.
Je pense qu’après cette semaine, les nerfs sont mis à rude épreuve. Je n’ai pas
envie de quitter New York, j’appréhende énormément mon boulot de manager, je
dois encore me remettre à chercher un appartement à Chicago…
Une fois dans l’avion, je décide d’écrire cet article mais il n’y a pas de
prise pour brancher mon ordinateur (décidemment). Je me mets à écrire un
brouillon sur mon calepin, un verre de vin blanc dans l’autre main. Je me mets
également à faire ma to-do list et commence à paniquer. Je décide d’appliquer
la méthode américaine et à écrire au dessus de cette liste, « tout va bien
se passer ! ».
Un peu de répit
Me voici donc à Chicago. J’ai loué une chambre chez l’habitant pour une
semaine, en espérant trouver un endroit où vivre entre-temps. Partir à l’étranger
pour gagner de l’expérience. Oui, effectivement, je confirme. Bref, cette
semaine a joué avec mes nerfs. Mais je n’ai pas d’autre choix que de m’accrocher
car les prochains jours ne vont pas être de tout repos.
Next : nouvel appartement, nouvel environnement professionnel,
nouvelles rencontres, nouvelle vie (bis)
David.
David.
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